Retour d'expérience du Pr Jean Paysant - IRR NANCY / MAJ 11/04/2020

Rédigé le 11/04/2020
SOFMER


MAJ du 02/04/2020: 

PR Jean Paysant CHRU et IRR Nancy : Expérience a 1 mois des premières rea

Nous avons reçu depuis qq jours une dizaine de personnes de la Cohorte COVID.

 Nous sommes un centre MPR et accueillons donc dans une logique de « centre MPR » les personnes qui ont besoin de MPR, de toute gravité (jusqu’à trachéo ventilé en faible nombre, atteinte neuroC et P grave, escarres,  avec VVP, SNG-GEP, O2 au masque…. ). Cela signifie que nous ne faisons pas du MCO : les patients doivent être stables médicalement et doivent justifier de la MPR (c’est-à-dire des personnes dont l’état antérieur permet la mise en œuvre de rééducation/réadaptation même initialement a minima, mais dans un objectif de progression vers retour autonome aux activités personnelles, professionnelles , loisirs).  Donc rien de neuf ! faire de la rééducation et de la réadaptation et pas de la « pneumo-infectieux, ou du pseudo soins continus…. » On n’est pas compétent et pas armé pour cela. Pourquoi le COVID modifierait nos compétences ? et d’ailleurs, les malades COVID, présent et à venir, ont un besoin très fort de Rééducation et de Réadaptation. D’ailleurs les services de réa et de SC mais aussi de Médecine pneumo-infectieux sont extrêmement content que nous fassions notre travail de centre MPR, et ils ont d’ailleurs bcp de lits libres au CHRU pour faire de la médecine (perte de quasi toute activité autre que urgence médico-chir). 

Les patients accueillis ces 4 derniers jours sortent donc des services MCO (1 direct de réa, 3 de SC, et 6 de médecineCovid). Les premiers ont eu des durees « courtes » de ventilation/sédation cad entre 5 et 12 j ; les seconds qui ne sont pas passés par les rea ont évité l’intubation mais limite, et ont eu la fameuse pneumopathie intersticielle (cette hyper inflammation avec tr de la perméabilité alvéolocappillaire et inondation) aussi, et ont des conséquences assez similaires.

 Les caractéristiques majeures sont : 

l’immense fatigue : à ne pas avoir la force de se mouvoir ou de s’alimenter alors qu’ils n’ont aucune atteinte neuro ni centrale ni péripherique, ni deglut :  le déconditionnement majeur, avec une dénutrition (on va entrer une patiente  sans aucun ATCD à 15g/l alb)… 

Par ailleurs on a entré un jeune avec un Sd de stress post traumatique majeur, car la décompensation respi est brutale, l’ambiance est pesante et, d’après certains réanimateurs, ils sont obligés d’intuber des patients jeunes qui vont bien mais qui vont se dégrader d’une minute à l‘autre, compte tenu du scan catastrophique : le choc psycho préalable est majeur, je suppose.

Les patients, dont nous avons prévu les entrées fin de semaine et la suivante (attente de stab medicale) sont plus lourds et classiquement attendus : 4 semaines de Ventilation, des PNP de rea, des escarres, et toujours ce tab de dénutrition… et puis les complications classiques : une TVP en plus, une IU a Coli, une surinfection bact pulm, etc… ce qui explique qu’ils mettent 5 semaines à arriver. 

Pour ce que je vois des tableaux, ce sera des malades classiques de post-réa (post infectieuses, post neuro céré, post médullaires-polytrauma…) mais comme c’est plus long plus de complications neuro et autres…  et surtout en plus grand nombre. 

Certes il y aura probablement des Insuff Resp Chroniques (sur fibrose), mais ce sera ceux que les pneumo n’arriveront qu’avec difficulté  à sevrer… ils relèveront de SSR pneumo (certains d’entre nous sont compétents et le feront) ; des struct seront probablement à créer ; mais je crois que seule l’étiologie est pneumo, et que les conséquences sont d'abord  neuromotrices, neurocognitives, orthopédiques, cutanées,  psychologiques… et évidemment le déconditionnement. Donc de la vrai MPR lourde. 

Voilà notre petite expérience au CHRU Nancy et au sein des 2 centres MPR de l’IRR à cette date (les premiers patients sont entrés en réa le 3 mars soit il y a un mois ! et les patients graves ne sortent qu’à peine du MCO). Donc tout ce que je vous ai dit va très certainement être remis en cause…

Et pour l'organisation;

La grosse complexité d’organisation : 

ce sont les mesures de protection à prendre , et donc la charge IDE AS plus forte qu’avec nos patients habituels (temps et inconfort de travail) et 7j/7. Et puis ce sera : quand rouvrir les plateaux techniques ? : car nous, au CLP, on fait toute la reeducation en chambre. Dans un de nos deux centres, on a pu mettre un étage en MPR neuro lourdes non COVID avec une etanchéité la meilleure possible entre les deux secteurs ; à suivre... Tout dépend des architecteures, et aussi des compositions de population.  En fait si, on prend les malade de MPR assez cognés après de la reaSC ou de la medecine, ils arrivent rarement avant J14 des symptomes (le risque est déjà faible) et à si à J21 il est très très  très faible. Pour nous les tests pour les malades sont inutiles et ont peu de validité. Les tests sont bcp plus interessants pour les soignants, et le management des equipes ! ou surtout le nouveau test à Anticorps : on attend !!

Et puis le pbm qui perdure c’est la charge psychologique dans les équipes, avec des comportements variables…

Jean PAYSANT IRR


Pr Jean Paysant, CHU NANCY

Nancy  suit de quelques jours Strasbourg. quelques mots clès.

0. verouiller l'etablissement de facon policiere et etiqueter tous les patients à risque.

1. Faire comprendre très très vite que les priorités changent (abandonner avec courage nos populations habituelles, et accepter d'avoir des lits vides et tout réorganiser (j'ai fait des fermeture de centres et des transferts de patients  et de personnels de plus de 60 km)

 

2.Sortir le masximum des patients à risque (et des personnels à risque). 3. mettre les mesures de préventions maxi en regroupant autant que possible (selon la topo des lieux) les patients à risque, pour blinfder au max l'entrée Freiner la communication intempestive, la communication doit etre géré par le chef médical.

3. Etre au services d'autres (pour nous c'etait le CHRU de Nancy , en admettant des dizaines de patients hors de nos indications habituelles, pour permettre d'up-grader des unités en SC ou en Rea ; mais pour d'autres, c'est d'admettre des patients de structures médicosociales, etc...

4. Freiner la communication intempestive, la communication doit etre géré par le chef médical. 3. Etre au services d'autres (pour nous c'etait le CHRU de Nancy , en admettant des dizaines de patients hors de nos indications habituelles, pour permettre d'up-grader des unités en SC ou en Rea ; mais pour d'autres, c'est d'admettre des patients de structures médicosociales, etc...

Toutes ces mesures, si vous ne les avez pas encore prises, il n'est peut etre pas trop tard. Et puis, c'est vraiment bizarre, on attend actuellement : on découvre ce que c'est d'avoir des lits vides, et du personnel en repos forcé !! on sait que le premier malade de rea est arrivé le 5 mars à Nancy, et on  l'attend... en moyenne vers 21 j, et puis après ce sera  du remplissage continu... Nous craignons la problematique de la charge de soins d'hebergement bien plus que de plateau technique, du fait de notre case mix et dimensionnement habituel (on fait souvent 50% de sortie les WE, soit a visée thérap, soit fin de sejour, soit sejours d'expetise et de revalidation...) et là ils vont tous rester. Mais cela, cela dépend de vos missions habituelles et de votre environnemment.

Il m'est apparu très vite important de communiquer Fort et vite, avec le personnel. Voila a titre d'illustration du message adressé à tous (présents ou au domicile). Très bien perçu à tout niveau.


Note de la direction 2020 03 19_pr_paysant Note de la direction 2020 03 19_pr_paysant